Mufles de lion sur les quais de Toulon

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#Art et culture #Histoire

Le 14 mars 2023

Histoire des quatre masques en bronze de lion qui ornaient les deux bassins portuaires de la Marine.

Chaîne vielle et chaîne neuve

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Joseph VERNET, Vue du port Neuf de Toulon, le parc d’artillerie, détail, © Musée national de la Marine

Depuis l’agrandissement de l’arsenal par Vauban, à la fin du XVIIe siècle, et jusqu’au début du XXe siècle, la marine disposait à Toulon de deux bassins portuaires, ou darses, la darse vieille, ou darse Henri IV, et la darse neuve, ou darse Vauban.

Ces darses étaient protégées vers la mer par des môles fortifiés. La communication avec la rade était assurée par deux passes, dont l ‘accès était protégé par une grosse chaîne en fer que l’on tendait tous les soirs à ras de l’eau. Ces entrées étaient ainsi communément appelées chaîne vieille et chaîne neuve. Les quais bordant la chaîne neuve étaient ornés de quatre masques en bronze représentant des mufles de lion tenant un anneau d’amarrage dans la gueule. Ils ont été confectionnés dans la fonderie de canons de Toulon par le maître fondeur François Hurant, en 1683.

Dans le tableau de Vernet « Vue du port Neuf de Toulon, le parc d’artillerie » on voit, à leur emplacement d’origine, deux des quatre masques en bronze. En 1867, deux d’entre eux ont été déplacés pour être installés sur des massifs en pierre décorant le quai nord de la darse de l’horloge (en face du musée naval, dans la base navale), lieu de débarquement et d’embarquement des hautes personnalités accueillies dans l’arsenal maritime.

Le mufle au Musée national de la Marine

En 2007, à l’occasion du tricentenaire de la mort de Vauban, le musée national de la Marine a présenté une exposition intitulée « Vauban à Toulon, l’arsenal et la rade ». A cette occasion, le mufle gauche a été descellé et présenté dans le cadre de cette exposition. Après examen du mufle, et de sa corrosion, les conservateurs en accord avec le préfet maritime, ont décidé de ne pas les remettre au ras de l’eau, dans le bassin dont ils sont issus, afin d’éviter que ne se poursuive la lente dégradation du temps.

En effet, ces mufles en bronze sont un des rares témoignages de l’arsenal historique de Toulon, celui de Vauban, donc de Louis XIV, dont il ne reste plus grand chose, excepté l’imposante corderie. Ils témoignent du savoir-faire des fondeurs du XVIIe siècle qui allient talent et maîtrise de la technique. Ils sont liés à une histoire émouvante comme le travail des bagnards chargés de tendre tous les soirs une lourde chaîne en fer afin de sécuriser la passe. Enfin, le bronze matière noble par excellence, très précieux en période de guerre, fut la cause de la disparition de deux des masques, refondus pendant la Révolution, vraisemblablement pour servir de canons.

Une solution envisagée pour ne pas « défigurer » ce bassin d’honneur, qui accueille rappelons-le, quelques personnalités du monde militaire et civil, est de les remplacer par une copie en résine résistant à la corrosion et aux intempéries. Cette solution a été de nombreuses fois utilisées par le ministère de la Culture ou par les Monuments historiques comme par exemple au Jardin des Tuileries, à Paris, pour remplacer et mettre à l’abri une partie des sculptures qui s’abîmaient à l’extérieur.

Le masque exposé dans le musée depuis 2007 provient de ce quai.

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